Bleue comme une orange (Norman Spinrad)

Trouvant enfin l’occasion de me replonger comme il se doit dans la lecture, j’en ai également profité pour retrouver le chemin de la blogosphère littéraire et du forum Planète SF, en profitant pour jeter un oeil sur la lecture commune du moment. Pour septembre, le Cercle d’Atuan a retenu Bleue comme une orange de Norman Spinrad !

N’ayant jamais lu d’ouvrage de cet auteur, quoi de mieux pour me lancer dans une nouvelle découverte ?

Bleue comme une orange

Mais avant de vous en causer plus en détails, petite précision ô combien importante : ne lisez pas le 4ème de couverture ! Celui ci a en effet un peu (beaucoup) trop tendance à dévoiler l’axe principal de narration, gâchant au plus au point l’effet de surprise potentiel. De mon côté, je m’efforce au mieux de ne pas spoiler dans mes chroniques, mais pour des raisons d’argumentations, je ne peux pas vous promettre de ne rien dévoiler cette fois ci… A vous de voir si vous souhaitez continuer la lecture de ce billet !

Revenons à nos moutons si vous le voulez bien. Bleue comme une orange, publié originellement sous le nom de Greenhouse Summer en 1999 (et donc la traduction française fait probablement référence au poème de Paul Eluard de 1929) nous plonge dans un monde complètement transformé suite au réchauffement climatique, où de nombreuses zones sont devenues inhabitables alors que d’autres deviennent de petits paradis sur Terre. Mais à l’image de notre situation actuelle, ces effets ne sont pas sans conséquences et notre chère planète bleue se rapproche bien trop dangereusement de l’effroyable Condition Vénus annoncée par une climatologue de renom… La 6ème conférence internationale CONASC saura-t-elle faire face à ses enjeux ?

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Le sujet est donc on ne peut plus d’actualité en cette veille de COP21,  réplique réelle de cette CONASC imagée. La date d’écriture et le nombre d’itérations de la conférence des Nations Unis laissant d’ailleurs présager que celle ci à servi de modèle à l’auteur… Une thématique passionnante donc, tant la frontière entre fiction et réalité semble se mêler mais dont le traitement par Norman Spinrad a généré son lot de frustration.

Les points positifs d’abord.

Les impacts du réchauffement climatique sont globalement bien décrits, notamment en ce qui concerne les zones les plus désolées ou les quelques villes qu’on a l’occasion d’apercevoir, le tout faisant bien froid dans le dos tant l’avenir présenté semble plausible. L’auteur nous fait clairement ressentir à quel point la situation est fragile et l’équilibre précaire, et qu’une action globale est nécessaire à la stabilisation du climat.

La base de l’intrigue est complexe sur de nombreux points, qui vont s’entremêler au fur et à mesure de la progression dans l’histoire. Un tel problème étant du ressort de l’humanité, tous les types d’organisations possibles se voient en devoir d’agir, impliquant une très forte politisation de la réflexion et un calcul poussé sur les impacts de chaque décision. Les interrogations purement égoïstes des différentes parties prenantes soulevées au fil des pages sont tout à fait plausibles tant elles collent à la réalité et au spectacle de chiffonniers que nous présentent nos politiques actuels. Les coups bas et autres actions retorses constituant même la base de l’intrigue, qu’ils aient lieux entre groupes opposés ou au sein même d’une organisation.

L’auteur introduit également la réflexion concernant les actions de chacun, aussi petites soient elles et jusqu’où peut-on justifier de certains actes terribles pour le salut d’une population entière. A une période où plus que jamais l’information est manipulée, tronquée et déformée, Bleue comme une orange nous encourage jusqu’à sa conclusion à constamment nous remettre en question et faire preuve d’esprit critique, tout en nous mettant nos actions en lumière pour nous faire réfléchir pleinement à l’impact de l’humanité sur son environnement.

De très bonnes idées donc, qui sont malheureusement contrebalancées par d’inévitables points négatifs.

Les personnages tout d’abord. Je n’ai pu développer aucune empathie ni attachement pour les protagonistes en général (à l’exception peut être du fantasque couple russe) mais les deux principaux m’ont irritée au possible, avec une bonne grosse lassitude envers le côté cul qui n’apporte absolument rien au récit si ce n’est une bonne dose de ridicule quand on connait le but de l’opération. Tout ce beau monde reste bien creux et ne s’étoffe finalement que très peu. Quant aux organisations présentées, elles ne prennent pas la dimension méritée. L’auteur nous présente un monde régit par un système de syndicats et d’actionnaires qui semble particulièrement intéressant, où chacun porte le poids de sa responsabilité propre et de celle de son organisation mais ne le développe pas, laissant le lecteur se dépatouiller avec le peu d’informations dont il dispose. C’est particulièrement vrai avec la partie Verte par exemple, opposée aux Bleus mais dont on ne sait rien et dont on n’en saura finalement pas plus.

J’ai également trouvé la construction du roman très bancale, l’intrigue brassant souvent beaucoup de vent pour rien et tournant autour du pot inutilement tant un certain nombre d’éléments auraient pu être omis sans problème. La narration souffre en effet de pas mal de longueurs, étant complètement noyée d’éléments inutiles durant la majeure partie de l’histoire pour finalement virer d’une complexité indigeste (et tombant un peu de nulle part avec un peu trop de facilité) au moment de conclure. Le tout se faisant au détriment de l’aspect purement écologique qui ne s’avère finalement là que comme prétexte à un jeu politique entre les groupes concernés. Et c’est surement le point qui m’a le plus déçue je pense, tant le sujet initial s’avère riche en réflexions et d’actualité pour n’être finalement jamais vraiment traité par l’auteur…

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Une lecture frustrante donc, tant les bons points et axes de réflexions soulevés sont intéressants (la condition climatique, l’importance de l’intervention de chacun, la manipulation de l’information, jusqu’où peut on aller pour une cause ou les conséquences de l’impact humain) mais ne s’avérant absolument pas mis en valeur, pollués par une narration maladroite et beaucoup trop de petits détails qui nuisent au thème global…

Bref, dommage ! J’ose toutefois espérer que tous les écrits de Norman Spinrad ne ressemblent pas à celui ci niveau qualité, je reste preneuse de toutes vos suggestions potentielles pour continuer à explorer l’univers du monsieur !

4 réflexions au sujet de “Bleue comme une orange (Norman Spinrad)”

  1. Je ne saurais pas lequel te conseiller, j’ai pas gardé énormément de souvenirs de mes Spinrad précédents (sauf une nouvelle bien fichue sur le Sida). Du coup je suis aussi preneuse de suggestions xD

    1. Eheh, c’est pas forcément l’auteur avec qui j’ai envie de replonger immédiatement mais j’aime bien lire plusieurs trucs pour me décider si j’accroche avec une plume ou pas… Si je tombe sur quelque chose de bien cool, je te dirais ! ^^

  2. Je n’ai pas lu beaucoup de Spinrad (en fait… trois. 😀 ), mais je garde un très bon souvenir de « Jack Barron et l’éternité » et sa virulent critique des médias. 😉

    1. C’est toujours deux de plus que moi ! :p je note ta référence en tout cas, ça m’a l’air pas mal du tout comme sujet en plus ! 🙂

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